11ème journée de l’atelier Développement durable et “acceptabilité sociale”
Mardi 19 avril 2016
10h-16h30
Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord
20 Avenue George Sand, 93210 Saint-Denis
Amphithéâtre 140
Métro ligne 12 arrêt Front Populaire
Coordinateur de la séance : Bruno Villalba [1]
La recherche scientifique est de plus en plus sollicitée pour permettre d’élaborer des décisions publiques acceptées par les usagers, notamment dans des choix techniques [2]. La psychologie sociale, l’économie comportementale, les sciences de la communication, les neurosciences ou la science politique sont sollicités pour répondre à cet « impératif écologique [qui] exige d’une part, des innovations technologiques et, d’autre part, des changements de comportement individuel et collectif (…) hypothétiques » [3]. Il s’agit dès lors de contribuer aux leviers du changement, qui feront disparaître les blocages et les réticences des acteurs.
Cela interroge les conditions de production d’un savoir scientifique réflexif. Mais au-delà de cette question épistémologique, l’acceptabilité sociale suppose l’adoption de procédures qui permettent l’appropriation par les acteurs sociaux de procédures, de normes ou des manières de faire, conformes aux options choisies par les préconisateurs.
La notion d’acceptabilité sociale, directement issue de la gestion des risques et du calcul rationnel a progressivement été reprise par les institutions alors qu’elle soulève de nombreuses questions
• La notion d’acceptabilité peut-elle répondre aux obstacles rencontrés par le développement durable, sans questionner son caractère hégémonique et impératif ?
• Dans quelle mesure, un “paternalisme libertaire” [4] confortant la rationalité latente des individus pour orienter leur choix en direction de cet “impératif”, ne renforce-t-il pas les contradictions de cet oxymore qu’est le développement durable ?
• Comment la recherche urbaine peut-elle s’extraire d’une approche normative de l’acceptabilité en termes de standards et de bonnes pratiques, alors même que les formes concrètes du développement durable sont constamment co-construites avec des acteurs publics et privés en demande de modèles transférables ?
• Dans quelle mesure, interroger la notion d’acceptabilité et ses usages, peut-il nous permettre d’une part, de donner sens aux difficultés concrètes que rencontre le développement durable et d’autre part, de mieux comprendre la nature des relations entre la recherche et le champ du développement durable ?
• Enfin, ce travail sur le rôle de l’acceptabilité peut-il nous permettre de trouver des points d’appui pour construire la critique vis-à-vis du développement durable ?
L’acceptabilité peut être perçue comme un « alibi sémantique pour assurer ou justifier la reconduction des pratiques usuelles » [5]. Il ne s’agirait alors qu’une d’une autre manière de réaffirmer la capacité des élites politiques et techniques dans la construction des décisions.
L’urgence environnementale – le singulier est simplement une commodité générique, car elle regroupe l’ensemble des urgences environnementales, qu’elles soient « naturelles », comme le changement climatique, ou socio-techniques, comme la question nucléaire – interroge cependant la question de l’acceptabilité sociale. Cela ne concerne pas simplement les dispositifs d’imposition en jeu (logique représentative/participative, sciences expertes/citoyennes), mais plus profondément la question des temporalités. Comment l’urgence interroge la capacité du « social » à s’adapter aux conséquences de cette urgence ? Les temps de l’effondrement (catastrophe lente et irruption soudaine de l’événement…) dessinent une autre grammaire de l’urgence et de la capacité des dispositifs classiques de la décision politique à « faire accepter » la gestion de l’urgence.
L’atelier a vocation à permettre une confrontation interdisciplinaire (philosophie, science politique) sur les conditions d’énonciation de cette urgence et les formes de son institutionnalisation (à partir de l’acceptabilité, qui suppose une transformation des pratiques et des représentations).
Les documents et les enregistrements audios de la séance sont directement accessibles depuis le programme ci-dessous
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Matinée (10h – 12h30)
Introduction de Bruno Villalba (matin)
Réflexion générale sur les modèles de la nature
• Hicham-Stéphane Afeissa [7] : « Appréhender la fin ? » (première partie) (deuxième partie) (liste des ouvrages cités en PDF) Débat avec la salle
• Edouard Jolly [6] : « L’ultime menace, c’est l’ordre du possible » (première partie) (deuxième partie) (support PDF de la communication d’E. Jolly) Débat avec la salle
Après-midi (14h – 16h30)
Introduction de Bruno Villalba (après-midi)
Approfondissement sur nature et politique en prenant le cas du climat
• Alain Kaufmann [9] : « Démocratie technique, participation, sites de problématisation: entre acceptabilité sociale et genèse d’une démocratie écologique » Débat avec la salle
• Raphaël Stevens [8] : « Scénarios de l’acceptation ? » Débat avec la salle
Discussion générale avec la salle sur les quatre interventions
Discutants : Bruno Villalba [10]
[1] Professeur des Universités, Science Politique, AgroParisTech.
[2] Hickson, A., Phillips A. and Morales G., 2007, « Public perception related to a hydrogen hybrid internal combustion engine transit bus demonstration and hydrogen fuel », Energy Policy 35 (2007), p.2249-2255.
[3] Centre d’analyse stratégique (2011), “Nudges verts” : de nouvelles incitations pour des comportements écologiques ; Note de presse.
[4] Thaler Richard H., Sunstein Cass R. (2003), « Libertarian paternalism is not an oxymoron », The University of Chicago Law Review, vol. 70(4).
[5] Marie-José Fortin, Yann Fournis, « Vers une définition ascendante de l’acceptabilité sociale : les dynamiques territoriales face aux projets énergétiques au Québec », Natures Sciences Sociétés 2014/3 (Vol. 22), pp. 231-239, p.232.
[6] Post-doc researcher on ERC Project: GRAPH (The Great War and Modern Philosophy) at the Husserl Archives, Institute of Philosophy, KU Leuven.
[7] Professeur agrégé, docteur en philosophie et en géosciences & environnement, membre associé du laboratoire “Logiques de l’agir” (EA 2274) de l’Université de Franche-Comté.
[8] Chercheur indépendant, spécialisé en résilience des systèmes socio-écologiques, formateur et auteur de Comment tout peut s’effondrer. Paris, Seuil, 2015 (avec Pablo Servigne) et Petit traité de résilience locale, éd. Charles Léopold Mayer, 2015).
[9] Sociologue et biologiste, directeur de l’Interface Sciences-Société de l’Université de Lausanne (UNIL).
[10] Professeur des Universités, Science Politique, AgroParisTech.